De l’émotion sur une scène

Festival international de Hammamet – Djam de Kays Rostom

La malchance a frappé, comme la foudre, le spectacle de Kays Rostom, Djam, présenté en première vendredi dernier au Festival international de Hammamet. Un violent court-circuit a fait sauter tout le système informatique utilisé pour piloter la prestation. Une vraie catastrophe. Djam est un spectacle de lumière et de musique qui met en interaction le son, l’espace et l’image à travers plusieurs «actions», aussi bien musicales, chorégraphiques, théâtrales que vidéographiques et picturales.

Kays Rostom, scénographe, également peintre et musicien, a toujours fait de la résonance d’un espace, de l’architecture d’une phrase musicale et de la tonalité d’une couleur, un leitmotiv, une constante.

Jusqu’à 11h00 du soir, l’équipe technique s’est acharnée à faire redémarrer les machines, en vain. On décide, quand même, de monter sur scène sous les applaudissements encourageants du public, toujours peu nombreux. Mais à la mosaïque manque désormais son éclat.

Dommage ! D’autant plus que les ingrédients d’une belle réussite étaient, bel et bien, présents sur scène. Kays Rostom a réuni, autour de lui, des talents confirmés tels que Alia Sellami, chanteuse, Imen Smaoui, Richard Cayre et Nejib Khalfallah, danseurs, et David Kuchermann, percussionniste. Malgré la déception, chacun a fait ce qu’il pouvait pour étouffer la tristesse et donner le meilleur de lui-même. Et ce n’est pas facile, on le reconnaît ! Mais ces artistes, malgré tout, ont réussi à créer de l’émotion sur une scène lugubre.

La recherche musicale y était aussi. Les sons s’entremêlent et font surgir un langage musical surprenant. Le gombri accompagne la voix aérienne de la soprano… Les percussions, souvent rares, se déchaînent en rythmes alternés suscitant des tons particuliers… Les genres musicaux s’enchaînent, tous différents, entraînant dans leur manège les corps immobiles sur des tabourets. Comme hantés par ces rythmes de toutes les couleurs, les danseurs envahissent la scène. Ils traduisaient, peut-être par leur mouvement saccadé, un monde fragile et incertain.

Porter un jugement sur ce spectacle, dans cette forme très inachevée à laquelle il a été réduit, risque d’être injuste. On préfère donc ne pas s’aventurer sur cette piste incertaine. Et s’arrêter là. Dans la brochure de la présentation, Kays Rostom avance que «Djam n’est pas une question d’aboutissement, c’est un désir d’accomplissement. Plus que le peintre, c’est la toile qui décide de la dernière touche. Plus que le musicien, c’est le son qui envahit l’espace. Plus que le scénographe, c’est la lumière qui trace les lignes»… Et, plus que l’artiste, c’est le destin qui décide de tout.

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