La découverte d’une culture oubliée

Festival du film maghrébin de Nabeul : «Close-up» sur le cinéma amazigh

Dans une salle presque vide, les projections continuaient en cette troisième journée (vendredi 9 septembre) du Festival du film magrébin à Nabeul, consacrée à un Close-up sur le cinéma amazigh. Et comme si le manque de public ne suffisait pas, une panne technique est venue remuer le couteau dans la plaie…Passons.

La première séance de projection, prévue à 16h00 a été une vraie catastrophe. Après de vains essais, les organisateurs sont arrivés, tant bien que mal, à projeter sur l’écran un court métrage Weldi ya Moulay et un long métrage Mimezrane (La femme aux tresses) de Ali Mouzaoui, au lieu de Mon cheval de Abdellatif Fodil et de La maison jaune de Omar Hekkar.

Heureusement que la deuxième séance s’est déroulée dans de meilleures conditions. Le programme proposé a été respecté et on a eu donc droit à Mokhtar de Halima Ouardiri et à La montagne de Baya de Azzedine Madour. Malgré la panne et les images parfois « défigurées », le public a pu découvrir un aspect d’une culture oubliée, qui nous est pourtant proche. Il a écouté une langue étrangère à nos ouïes, mais qui pourrait être la nôtre…

Ce festival, en dépit de ses tâtonnements et de son balbutiement, ouvre la voie à une nouvelle optique artistique, sociologique, historique et identitaire. Il dresse une mosaïque culturelle et linguistique des pays du Maghreb, tout comme le Festival culturel national annuel du film amazigh d’Algérie (Fcnafa), invité d’honneur de la session, en la personne de son directeur, Hachemi Assad.

Contes et légendes

Ce cinéma traduit autant de valeurs que d’émotions. Il raconte les légendes et les croyances d’une population qui n’a pas cessé de lutter pour la conservation de sa mémoire collective. Ce cinéma décrit la relation intime que nourrit l’humain avec la nature et les animaux. Il parle de l’amour et de la beauté sur un ton pur et sincère, à la limite du naïf…

Mimezrane commence par la formule magique : « Il était une fois ». Il relate l’histoire d’une jeune fille surnommée Mimezrane, belle, aux yeux étrangement tristes. Elle tombe amoureuse de Hennouche, un malicieux petit garçon aux grands yeux noirs. Leur vie était paisible jusqu’au jour où leurs pas les menèrent au-delà de la rivière. Là, un horrible épouvantail veillait sur une aire où ne poussait aucune fleur. Mimezrane, prise de pitié pour les oiseaux, supplia Hennouche de brûler l’épouvantail…

Le temps passa et les amoureux voulaient se marier. Mimezrane avoue à son soupirant sa malédiction secrète. La jeune fille est condamnée à rester stérile, tant qu’elle ne porterait pas les deux bracelets de la fécondité. Hennouche, fou d’amour pour elle, part à la conquête des bijoux au risque de perdre la vue, car la légende veut que toute personne qui verrait les bracelets avant de les toucher, devient aveugle…A son retour, la fille aux tresses, qu’on a mariée entretemps, fut lapidée jusqu’à la mort, victime de son grand amour.

L’histoire de Baya, l’héroïne du film de Azzedine Madour n’est pas plus heureuse que celle de Mimezrane. Elle était la fille du guide spirituel d’un groupe de la résistance berbère qui a dû céder devant l’invasion française. Les terres de Kabylie ont été colonisées et certains villageois contraints à fuir vers les montagnes arides, devenues leur lieu d’exil. Le personnage de Baya reflète la tristesse et la frustration vécues par son peuple. Victime de l’injustice sociale, son amour a été également brisé et son époux tué par son rival de toujours, Saïd, le fils de Bavh-agha…

Une belle découverte en somme. On espère que ce festival enrichira cette vocation, en améliorant et en soignant davantage les conditions de projection.

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