Une histoire de la terre

« 24 heures de céramique » au Centre national de la céramique d’art à Sidi Kacem Jélizi

Le Centre national de la céramique d’art à Sidi Kacem Jélizi a rendu hommage, le week-end dernier, aux potières de la Méditerranée. Derrière leurs fours, des femmes de Sejnène, de Maâtkas (Algérie) et des îles Canaries (Espagne) ont mis la main à la pâte pour faire connaître leur métier et leur savoir-faire.

C’est à travers cette tradition ancestrale commune, transmise de mère en fille, que ces femmes retracent leur histoire et leur quotidien. Les berbères de Séjnane étaient au rendez-vous munis de leurs récipients usuels de tous les jours et leurs bibelots avec leurs motifs colorés au naturel…

Ce sont elles qui façonnent l’argile et qui créent aussi la teinture à partir des feuilles desséchées et moulues. Elles donnent des formes à une terre brune et dessinent des motifs à caractère naïf. Durant cette journée, on a essayé de mettre en lumière cet art rural en expliquant les différentes techniques millénaires de modelage, de cuisson et de décoration.

Ce sont ces paysannes qui ont su sauvegarder le patrimoine et lui donner une valeur économique et touristique. Leur rendre hommage dans ce cadre historique est certes une manière de les aider à protéger leur héritage culturel et à ne pas le laisser se dégrader. Ces femmes continueront à défier le temps et imposeront ainsi leur identité. Leur poterie est sans aucun doute leur mémoire, celle de leur culture et de leur savoir-faire ancestral. Les motifs et les symboles ne sont jamais fortuits.

Selon les chercheurs, «les motifs décoratifs de la poterie de Maâtkas remonteraient à la préhistoire. On s’en serait même inspiré pour les écritures méditerranéennes, dont celle berbère, tifinagh». C’est, en tout cas, ce que dit le Pr et chercheur, Dahmani, de l’Université de Tizi Ouzou dans une revue en ligne.

Une tradition ancestrale

L’histoire de la poterie en Tunisie est relatée sur le Net, et en particulier sur le site http://www.raken.com. On y rappelle que le travail de l’argile s’est profondément enraciné dans la culture tunisienne depuis la civilisation capsienne et que la céramique modelée date particulièrement des premiers âges du néolithique.

Il existe deux types de poteries : une tournée par les hommes, et une autre modelée par les femmes, qui est présentée au cours de cette journée. «Le renouveau de la céramique en Tunisie, lit-on sur les pages de ce site, a coïncidé avec l’introduction par les Phéniciens du tour du potier».

A l’époque romaine, la Sigillée africaine, reconnaissable à sa pâte rouge vif et son décor en relief, fait son apparition. Mais c’est surtout avec l’avènement de l’Islam que la céramique tunisienne connut son essor. Les formes sont devenues plus recherchées et le décor plus fantaisiste: les Aghlabides introduisent les motifs floraux, zoomorphes, et géométriques et «annoncent ainsi la poterie traditionnelle de Nabeul et de Djerba», comme on le rappelle sur le site. Les Fatimides mêlent la faune à la figure humaine.

Quant aux Hafsides, ils ont utilisé des ornements abstraits qui se limitent à des motifs floraux et géométriques. Ensuite, intervient l’influence andalouse qui introduit le procédé qui consiste à cerner les motifs émaillés afin d’obtenir des carreaux de revêtement à émail polychrome, ornés de figures géométriques polygonales. «Cette influence s’est affirmée grâce au Saint Abu El Kacem El Jalizi, dont le mausolée à Tunis témoigne», lit-on dans le site.

Les 24 heures de la céramique dans ce lieu historique rendent non seulement un hommage à la poterie en Tunisie mais rappelle également son importance historique et socioculturelle. Elles retracent l’histoire de l’art de la terre.

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