Conférence de presse de Sabeh Fakhri
Visage fatigué, voix haletante, Sabeh Fakhri paraissait cependant confiant lors de la conférence de presse, tenue avant-hier, la veille donc du concert d’hier soir. «Rassurez-vous, je vais très bien», affirmait-il en souriant. Il assure qu’il n’a pas d’âge, que sa voix n’a pas pris une ride et qu’il continuera à défier le temps avec force.
A l’en croire, il est toujours capable de tenir le ton des heures durant sans se fatiguer et sans perdre la mesure. «Il y a quelques mois, j’ai chanté jusqu’à l’aube et ma voix ne m’a pas trahi», renchérit-il. Sabeh Fakhri satisfait toujours la demande croissante des Alepins qui exigent une ivresse musicale sans début ni fin. «Pour eux, le chant n’a pas de durée et la voix est sans limite», rappelle l’artiste, amusé.
Depuis 60 ans, c’est le public qui l’inspire et qui l’allume comme une braise. Il est le facteur essentiel de sa réussite. A lui, il transmet un message dans le respect et la sincérité. Le ténor paraît impatient de retrouver la scène de Carthage et ses gradins. Il promet un concert de haute facture, meublé de muwachahât, de qasa’ed, de morceaux populaires et de wasla… Il inclut dans son programme deux chansons dédiées à la Tunisie : la première est un muwachah signé Salah Mehdi et le second est un poème écrit par le Tunisien Ahmed Gharbi et composé par le Syrien Selim Tharouet.
Outre ces deux chansons inédites, le ténor conserve le même répertoire. Mais chaque prestation de Sabeh Fakhri ne ressemble jamais à la précédente. C’est un chanteur qui compose sur scène les vers et qui mesure le souffle. Il se laisse envahir par la chaleur d’un instant pour créer la magie de cette musique enivrante. Son point fort reste l’improvisation. Un don mais aussi un savoir. «Le chanteur doit avoir une gorge bien musclée et une tête bien remplie. C’est essentiel», affirme l’artiste.
Pour enrichir une bibliothèque «pauvre», selon l’artiste, Sabeh Fakhri a consacré dix ans de sa vie à rédiger un livre Ma Ghanah Sabeh Fakhri : «Un ouvrage que je voulais de référence, qui servirait aussi bien aux chanteurs qu’aux critiques et aux apprentis… bref, un ouvrage destiné à tous ceux qui s’intéressent à la musique alépine», précise-t-il.
Maîtriser le chant d’Alep, c’est avant tout s’armer d’une méthode irréprochable et d’une force inépuisable. Pour Sabeh Fakhri, il y a encore du pain sur la planche. Et le temps n’est pas encore venu de passer le flambeau. L’artiste considère que l’âge de l’homme est fonction de ce qu’il ressent. Et le ténor se sent toujours à l’apogée de son art.
Ceux qui ont fait le déplacement hier à Carthage auront-ils été de son avis?.