- Faire de la Tunisie une destination culturelle
- La préparation d’une liste de 46 sites et monuments, qui fera l’objet d’une correspondance avec l’Unesco, en vue de l’inscrire officiellement au patrimoine mondial
«Dans l’histoire antique, on avait le pouvoir. Et dans un futur, proche ou lointain, on pourra le récupérer. L’avenir est dans ce pays. Inutile de chercher ailleurs», a affirmé Mehdi Houas, ministre du Commerce et du Tourisme, lors d’une conférence de presse tenue sous une tente plantée à proximité de l’amphithéâtre de Oudhna.
Le haut responsable, qui s’est déplacé en compagnie de Ezzeddine Bach Chaouch, ministre de la Culture, dans ce site archéologique, a annoncé une bonne nouvelle : «La préparation d’une liste de 46 sites et monuments, qui fera l’objet d’une correspondance avec l’Unesco, en vue de l’inscrire officiellement au patrimoine mondial».
Mais la rencontre va au-delà de l’événement. Les deux ministres ont réuni, dans cette ville antique, qui était probablement une agglomération berbéro-punique transformée en cité romaine à l’époque de Octave-Auguste, la plus ancienne des colonies d’Afrique, 37 ambassadeurs, plusieurs journalistes et autres responsables. Objectif : mieux faire connaître la richesse de la Tunisie. «Quand j’ai visité cet endroit pour la première fois, il y a juste un an, en compagnie du ministre de la Culture, je n’ai eu qu’une seule envie, faire partager ma découverte», confie M. Mehdi Houas.
C’est pour cette raison que les ministres ont décidé d’inviter, une fois par mois, les ambassadeurs accrédités à Tunis ainsi que les journalistes à visiter un site ou un monument historique, d’où le choix de Oudhna, un site situé sur la route de Zaghouan. Il domine une plaine agricole fertile de plusieurs hectares qui s’étend entre djebel Ressas, djebel Boukornine et oued Méliane.
Les fouilles, entreprises d’une manière interrompue, depuis le XIXe siècle, ont pu dégager partiellement un amphithéâtre, un capitole, de grands thermes publics, la maison dite Laberii, les grandes citernes, l’aqueduc, le théâtre…
L’amphithéâtre, avec ses larges gradins et ses galeries souterraines, a été la première étape de cette visite. Il est classé au troisième rang après ceux d’El Jem et de Carthage. Les visiteurs ont eu droit ensuite à une promenade dans la vaste demeure d’une superficie de 2.300m2,construite par la riche famille Laberii (IIe siècle après JC). Cette maison possède de belles pièces pavées de copies de mosaïque (les originales sont exposées au musée du Bardo).
C’est au capitole, l’un des plus grands temples d’Afrique, «si ce n’est le plus grand», comme le pense Habib Ben Hassen, archéologue, que s’achève cette visite. Aujourd’hui, le temple, dédié à Jupiter, Junon et Minerve, n’existe plus. Seul le podium très élevé, d’ailleurs, est bien conservé.
Où est le musée du site ?
Dans le sous-sol, aujourd’hui aménagé pour les visites, une maquette reproduisant la grandeur de ce temple est placée dans cet espace.
A côté, se cache, derrière les murs, un dessin d’une rare beauté où on devine l’esquisse d’un combat d’ours. «Cet animal vivait sur notre territoire. Il est même importé de chez nous», raconte l’archéologue Habib Ben Hassen. Ce dernier est aujourd’hui inquiet pour la sécurité de ces pièces. «Elles peuvent être endommagées à n’importe quel moment par manque de vigilance. Nous avons pourtant préparé deux salles qui peuvent contenir un musée du site. Nous avons sélectionné, puis inventorié la collection à exposer.
Nous avons placé l’installation électrique et autres nécessités muséographiques… Mais le projet tarde à être réalisé», reconnaît l’archéologue. Pour le responsable du site, aujourd’hui à la retraite, cette visite en fanfare des officiels et du corps diplomatique sert, sans aucun doute, à la promotion du site.
«Mais Oudhna, malgré son importance historique, manque de l’essentiel», précise-t-il. L’archéologue suggère une subvention annuelle qui permettrait l’entretien de ces lieux, leur mise en valeur, la restauration et la consolidation de ses monuments… «Un lieu d’accueil devra être aménagé pour permettre aux visiteurs de se reposer, de boire et de manger.
On devrait aussi leur offrir des livres d’histoire ou des produits dérivés du patrimoine», note encore l’archéologue. Dommage que ce site, pourtant non loin du Grand-Tunis, demeure mal connu. Le nombre de visiteurs ne dépasse pas les six mille par an. «Un chiffre qui ne reflète pas les potentialités réelles de ce site», précise un visiteur.
La faute à qui ? «Peu importe ! On a longtemps banalisé le tourisme tunisien, le vidant de toute dimension culturelle. Il est aujourd’hui essentiel de combler les brèches et de réconcilier les deux secteurs pour créer l’essor économique de notre pays», affirme de son côté Ezzeddine Bach Chaouch.
«Tout le territoire tunisien mérite d’être inscrit sur la liste du patrimoine mondial», plaisante-t-il. Pour lui, il est important de connaître son histoire.